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La revue de littérature sur l'état des lieux de la complexité en gestion de projet fait ressortir un constat sans appel, que Crawford résume en disant que la complexité est au premier rang parmi les vrais défis de la gestion de projet (Crawford, 2006). Parallèlement, nous sommes passés du Web 1.0 au Web 2.0 c'est dire du paradigme de l'utilisateur consommateur passif au paradigme de l'utilisateur acteur. Ce Web 2.0 est essentiellement composé des médias sociaux qui donnent le pouvoir à l'utilisateur de s'exprimer par l'ajout de commentaires, d'évaluations ou par l'édition de documents de formats divers. Parmi ces médias sociaux, le wiki ouvre les portes à la collaboration de masse. Si le blogue est un médium de l'un (le bloggeur ou la bloggeuse) vers le multiple (les lecteurs) en anglais "one to many", le wiki est un médium du multiple vers le multiple en anglais "many to many", les lecteurs/auteurs vers d'autres lecteurs/auteurs. La multiplicité des lecteurs/auteurs est rendue possible par la convivialité d'édition qu'offre le wiki. Chaque page Web étant librement modifiable chacun peut contribuer à la construction d'un savoir collectif. Le wiki permet aux utilisateurs de créer des hyperliens. Par ces hyperliens, ils peuvent se connecter entre eux et connecter l'information, dont la représentation sous forme de carte heuristique dynamique révélera des liens passés inaperçus à ce jour (Bronovski). Ainsi, nous proposons de modéliser le wiki comme un outil pour composer avec la complexité en gestion de projet. Pour asseoir notre réflexion et construire notre cadre conceptuel, nous nous appuyons sur deux tremplins que sont la systémique et la complexité. Ceux-ci seront ainsi rapprochés des attributs du wiki pour en permettre la modélisation.

2.3.1.1 Le tremplin de la systémique

La systémique a pour ambition de dépasser les limites cartésiennes en s'intéressant non pas à la partie mais au "tout". Morin définit un système comme "une unité globale organisée d'interrelations entre éléments, actions ou individus" (Morin Méthode I p.102). Or le wiki est une "unité globale organisée d'interrelations" de pages Web (éléments) et d'usagers (individus) et qu'à ce titre nous pouvons le qualifier de système. Le "système wiki" est aussi un système d'information soit un réseau complexe de relations structurés où interviennent des hommes, des machines et des procédures, qui a pour objet d'engendrer des flux ordonnés d'informations pertinentes, provenant de sources internes et externes à l'entreprise et destinées à servir de base aux décisions (Lambin, 2006 p.26). Le wiki est un système flexible dans son architecture technique ce qui permet une intégration facile à d'autres systèmes d'information et flexible pour l'utilisateur qui pourra modeler sa structure à souhait (Ali Ouni, 2008 Chap. 1.3 - Vers le KM 2.0 p.60). Cette flexibilité donne au wiki la capacité de s'adapter aux différentes fonctions et besoins organisationnelles et pour Ouni, il combine deux outils en un, le groupware pour l'aspect collaboratif et l'intranet pour l'aspect publication de l'information (ibid p.60). Il diffère des gestionnaires de contenu classiques au niveau du contrôle d'accès, de l'édition de contenu et de l'organisation du site (Choate, 2008 p. 9). C'est un accélérateur des processus projet (Ali Ouni, 2008 Chap. 1.3 - Vers le KM 2.0 p.68).

Pour modéliser ce système c'est à dire "instrumenter les pourquoi de ses comment" (Le Moigne 1977-2006 p.22), nous retiendrons de la systémique les quatre questions inséparables:

  • il fait quoi ?
  • dans quoi ?
  • pour quoi ?
  • devenant quoi ?


(Lexique MCX APC (http://www.mcxapc.org consulté le 02.05.08)

La question "il fait quoi?", positionne le wiki par rapport à ses fonctions pour composer avec la complexité, il s'agit de son activité. La question "dans quoi?", positionne le wiki dans son environnement, c'est une mise en contexte. La question "pour quoi?", positionne le wiki dans le temps pour montrer comment il se transforme, comment il évolue. Enfin, la question "devenant quoi?" positionne le wiki en terme téléologique pour en déterminer les finalités.

2.3.1.2 Le tremplin de la complexité

De la complexité, nous retenons les trois principes de Morin: la dialogique, la récursion et l'hologramme (Morin, 2005, p.98 à 100). Les publications relatives à la complexité en gestion de projet définissent et catégorisent cette dernière. Elles marquent aussi un tournant dans la pensée ouvrant la porte à une gestion de projet qui ne serait plus uniquement déterministe dans ses principes. La notion de complexité a été étudiée en gestion de projet, il nous a toutefois semblé opportun d'en élargir le champ. En effet, si définition et catégorisation de la complexité ont été clarifiées, il n'en va pas de même pour les outils permettant aux gestionnaires de composer avec elle. Nous nous appuierons donc sur ces trois principes morinniens pour modéliser l'outil wiki.

La dialogique: En s'assurant que les logiques antagonistes, contradictoires et complémentaires s'expriment librement au sein de leurs projets, les gestionnaires seront en mesure d'avoir une vue d'ensemble la plus proche possible de la réalité. Chaque partie prenante ayant l'opportunité de s'exprimer et d'être entendue. Si toutes ne seront pas nécessairement satisfaites, les causes et les conséquences auront quant à elles étaient clarifiées et pourront être appréhendées de façon plus adéquate.

La récursion: Dans le cas de projets complexes, la pensée linéaire atteint ses limites. Il nous faut alors passer à une pensée plus à même de prendre en compte les causalités circulaires telles que les boucles de rétroactions où les effets rétroagissent sur les causes tel que l'a démontré la cybernétique et même aller au-delà avec la récursion. Dans le cas de la récursion dans le sens où l'emploi Morin, les causes et effets n'existent pas les uns sans les autres. En d'autres mots les effets des uns sont les causes des autres et vice et versa. Cette notion est encore bien plus forte que celle de rétroaction.

L'hologramme: Le cartésianisme a concentré ses efforts sur la compréhension des "parties" avec pour conséquence le réductionnisme et la disjonction. La systémique en voulant redonner sa place au "tout" est parfois tombée dans l'excès inverse, le holisme (Morin, 2005 p.34). C'est à ces limites du cartésianisme et de la systémique que la pensée complexe tente de répondre en particulier avec le concept de l'hologramme qui vise à réunir à nouveau le "tout" et ses "parties". Concrètement, il s'agit d'avoir connaissance du tout lorsque l'on étudie une partie, le tout est dans la partie à l'instar de l'ADN et d'avoir connaissance des parties quand on est dans le tout, la partie est dans le tout.

Pour nous aider à opérationnaliser ce troisième principe qu'est l'hologramme, nous retenons les cinq principes de Morgan pour penser ce qu'il appelle l'"organisation holographique", c'est à dire une organisation apprenante.

Ces principes sont (Morgan, 2006 p.98):

Principe n.1: construire le "tout" dans les "parties"
Principe n.2: l'importance de la "redondance"
Principe n.3: la variété requise
Principe n.4: les spécifications minimales
Principe n.5: apprendre à apprendre

Si les trois principes de complexité et ces cinq principes de l'hologramme furent jadis plus ou moins utopiques quant à leur opérationnalisation, ils prennent avec les technologies de l'information et de la communication tout leur sens. C'est pourquoi nous proposons le wiki comme un instrument pour composer avec la complexité. Cet outil a déjà donné le jour à la plus grande encyclopédie mondiale Wikipedia éditée de façon collaborative tant par des experts que par des amateurs ayant soif de partager leur savoir. On imagine fort bien la complexité relative aux multiples interactions, boucles de rétroaction et autres effets récursifs entre les éditeurs d'origines diverses ayant chacun leur cadre mental. Il est ici intéressant de s'arrêter sur l'outil. En effet, quel autre instrument que le wiki, existant à ce jour, aurait pu permettre cette construction collective d'un savoir planétaire en si peu de temps? À notre connaissance aucun n'aurait obtenu un tel succès. À partir de notre second tremplin de la complexité, nous exploitons maintenant les filons de l'épistémologie de la dialogique, de la culture récursive et de la structure holographique.

L'épistémologie dialogique

L'épistémologie c'est "l'étude critique des sciences, destinée à déterminer leur origine logique, leur valeur et leur portée" (Petit Robert 1995) et la dialogique consiste à maintenir la dualité au sein de l'unité entre deux logiques à la fois complémentaires et antagonistes (Morin 1991, Cerisy p.291), cela revient à dire que l'on conserve deux logiques, deux points de vue qui s'opposent, plutôt que d'en imposer un seul.

La notion de dialogique fait partie des piliers de l'encyclopédie en ligne Wikipedia même si le terme de dialogique propre à Morin n'est pas directement employé. Elle se traduit par la ''recherche de la neutralité de point de vue" en anglais "neutral point of view" ou NPOV.
Ce qui signifie que les articles ne doivent pas promouvoir de point de vue particulier. Parfois, cela suppose de décrire plusieurs points de vue; de représenter chacun de ces points de vue aussi fidèlement que possible, en tenant compte de leurs importances respectives dans le champ des savoirs; de fournir le contexte nécessaire à la compréhension de ces points de vue ainsi que de qui les tient; et de ne représenter aucun point de vue comme étant la vérité ou le meilleur point de vue. (Wikipedia, http://fr.wikipedia.org/wiki/Wikip%C3%A9dia:Principes_fondateurs consulté le 05.05.09)
Si l'on applique ce principe au "système wiki" qui pilote le projet, on garantie à chacun de pouvoir donner son avis. "Le wiki est en soi démocratique" (B. Leuf & W. Cunningham, 2001). Il est par essence ouvert au dialogue, au choc des idées, à la nouveauté, à l'incertitude, à l'inconnu. Mais garantir la libre expression dans un wiki n'est pas chose aisée, il faut dans un premier temps avoir une base de connaissance commune mais surtout réfréner ses aspirations à imposer une vision unique. Ce que confirme Ayache,"la communication des idées exige un "système médiateur" (Vygotsky Lev, Thought and Language, Cambridge MIT Press 1986), c'est-à-dire un socle commun de connaissances que les interlocuteurs enrichissent, et à partir duquel ils s'informent mutuellement. Toutefois, Dan Sperber et Deirdre Wilson vont encore plus loin en estimant que la communication consiste, pour l'émetteur, à transformer l'"environnement cognitif" du cerveau de son interlocuteur. Quand je vous parle, j'essaie de modifier les hypothèses qui sont présentes dans votre cerveau afin que vous acceptiez pour vraies celles que je vous communique. Mais, de votre côté, vous ne restez pas passif, et afin de maximaliser la communication, vous vous efforcez de reconnaître quelles sont mes intentions" (Ayache 2008, p.146). Cette distinction entre avis différents a pour but de mieux les accorder et non de les confondre (Glissant, 2009 p.72). De plus, lorsque Glissant aborde le rapport des cultures dans la pensée des créolisations il nous dit que l'on peut échanger avec l'autre sans pour autant se perdre ou se dénaturer (Glissant, 2009 p.66). La prise en compte des divergences de point de vue se retrouve aussi chez Ouni qui montre que les wikis sont un support aux processus de divergence et aux processus de convergence de Briggs (Briggs, 2001). Pour illustrer l'épistémologie dialogique ce sont les processus de divergence qui nous intéressent soit un mouvement vers davantage d'idées et de concepts, tel l'exemple des activités de brainstorming (Ouni 2008 - p.61)
Si l'on parvient à définir les logiques antagonistes en milieu corporatif, idéalement on souhaiterait les voir coexister, mais cet idéal ne sera pas toujours accessible. Si l'on ne peut maintenir la dialogique mais qu'on a utilisé le wiki pour circonscrire les logiques en présences, alors les choix qui seront faits, le seront en connaissance des causes voir comme le disait Le Moigne des conséquences. Plusieurs reconnaissent que cette diversité de points de vue est nécessaire. Pour Noveck, elle stimule la richesse des conversations (B. S. Noveck, 2009 p.39). Pour la CIA "Un marché sain d'idées pertinentes émerge du partage des points de vue ... Toutes les idées ne naissent pas au sommet" - "A healthy market of debatable ideas emerges from the sharing of points of view. ... Not all good ideas originate at the top" (Andrus, 2005).

Noveck nous donne un aperçu de ce à quoi pourrait ressembler une "démocratie collaborative" qu'elle définit comme "une nouvelle approche d'utilisation des technologies pour améliorer les résultats par la sollicitation d'expertise (où l'expertise est défini de façon large pour inclure à la fois le savoir scientifique et l'expérience populaire) de pairs auto-sélectionnés travaillant ensemble en groupe sur des réseaux ouverts." (traduit de B. S. Noveck, 2009 p.17). Ces technologies liées à Internet ont la particularité de libérer la puissance de la décentralisation (O. Brafman et R.A. Beckstrom, 2006 p.7), que Brafman et Beckstorm résument ainsi "dans un sens, il n'existe aucun lieu où les décisions importantes sont prises, et dans un autre sens, les décisions sont prises par tous partout" (ibid p.21)

"Sous l'ancienne méthode de travail, les bureaucrates pourraient décider de réparer un pont en réponse à un sondage d'opinion ou d'un vote. Or les bureaucrates pourraient publier un plan détaillé de réparation du pont, sollicitant des commentaires en réponse à une notification de proposition de régulation, attirant la participation de groupe d'intérêt et de lobbyistes mais pas des citoyens, qui ne pourront jamais espérer atteindre le degré d'influence des intérêts corporatifs. Des communautés pourraient utiliser le Web pour influencer la réparation du pont mais avec peu de chance de se voir impliquées dans des décisions particulières. Le gouvernement et les organisations non gouvernementales pourraient organiser un débat face à face au sujet du pont et espérer utiliser l'événement pour générer un article dans les journaux qui influencera la décision. Une discussion similaire en ligne pourrait ou pas attirer l'attention." (B. S. Noveck, 2009 p.20)

On est ici en présence d'un cas typique de gestion de projet et plus particulièrement de gestion des parties prenantes et force et de constater qu'à ce jour de nombreux projets suivent cette logique où les citoyens souvent les utilisateurs et payeurs du produit final résultant du projet ne sont pas ou peu consultés.

B. S. Noveck nous propose alors la logique suivante:
"Sous une stratégie collaborative, les bureaucrates établissent les processus, puis définissent et posent les questions avec pour but d'obtenir de l'information d'utilisateurs du pont (conducteur de poids lourd, banlieusard), d'un ingénieur et d'enthousiastes éclairés. Le public peut fournir preuves et données pour aider à la prise de décision, analyser les données une fois fournies, et participer au travail d'édition, de conceptualisation et d'implantation des politiques. Alternativement, si les officiels mettent la priorité sur la sécurité du pont, ils pourraient stimuler le secteur privé, les organisations à but non lucratif, et les individus à développer leurs propre stratégies, comme d'organiser un groupe d'inspecteurs bénévoles en charge de la sécurité du pont qui partagent leurs travaux sur un site Web partagé. Les citoyens ne parlent plus du processus, ils sont le processus." (ibid p.20 - 21)

Ceci illustre bien la prise en compte de la dialogique, où toutes les parties prenantes sont amenées à partager leurs idées, à participer à la prise de décision et à l'opérationnalisation des politiques, autrefois impossible, ceci est aujourd'hui rendu possible par l'utilisation de technologies tel que le wiki.

Il est dans la nature du wiki de donner libre accès à l'information, d'autoriser l'édition et la critique constructive de son contenu et de sa structure. Nous pouvons ainsi dire que la dialogique est génétique au wiki, nous la traduisons par "l'épistémologie de la dialogique".

Culture récursive

Le potentiel dialogique du wiki pour prospérer doit pouvoir s'appuyer sur une culture favorable.
Si G. Hofstede définit la culture au sens large comme "la programmation collective de l'esprit humain qui distingue les membres d'un groupe humain de ceux d'un autre. La culture dans ce sens est un système de valeurs communes partagées" Traduit de (Hofstede ???), E. Schein lui donne une saveur organisationnel "c'est le niveau le plus profond de suppositions et de croyances partagées par les membres d'une organisation, qui opère de façon inconsciente et définit dans le sens 'prendre pour acquis' la perception qu'une organisation a d'elle-même et de son environnement" Traduit de (Schein, 1988). Les membres d'une organisation sont à l'origine de sa culture, mais cette culture est aussi à l'origine de ses membres. Rappelons qu'''un processus récursif est un processus où les produits et les effets sont en même temps causes et producteurs de ce qui est produit" (Morin 2005 p.99 et 100).

Le grand biologiste Dobszansky disait:

En changeant ce qu'il connaît du monde
l'homme change le monde qu'il connaît;
En changeant le monde dans lequel il vit;
l'homme se change lui-même.

Nous observons ce phénomène au sein même du wiki, dans l'influence réciproque qu'ont les utilisateurs sur le wiki et le wiki sur les utilisateurs. C'est l'idée forgée par C'est l'idée forgée par Montesquieu (Montesquieu, 1849), popularisé par Churchill (1849-1965) et reprise par Putnam (Putnam, Leonardi et Nanetti, 1993): "On donne forme à nos structures et en retour elles nous forment." Les utilisateurs donnent forme au wiki qui en retour les forme. Si l'aspect récursif est un fait pour la majorité des outils, il prend une toute autre dimension avec le wiki. En effet, la modélisation se construit comme un point de vue pris sur le réel à partir duquel un travail de mise en ordre, partiel et continuellement remaniable, peut être mis en oeuvre (Le Moigne 2007 p.22). Ceci est notamment possible grâce aux capacités de projection qu'offre l'écriture "une fois que quelque chose est extériorisé, on peut l'observer, l'étudier, le changer, le perfectionner, tout en apprenant des choses essentielles sur soi" (Hall Edward T. Au-delà de la culture 1979). La convivialité d'édition du wiki, permet aisément ce travail de mise en ordre et de remaniement continuel des écrits tout en conservant les étapes de sa construction sous forme d'historique.

Noveck y voit un profond changement à venir dans l'élaboration de certaines politiques. "Des équipes délocalisées travaillant ensemble par l'intermédiaire d'un écran qui leurs reflète leur travail, peut améliorer la gouvernance de manière bénéfique et inattendue auparavant non considérée par la participation politique traditionnelle" - "Distributed groups working together mediated by a screen that mirrors their work back to them can improve governance in helpful and unexpected ways that have not counted before as traditionnal political participation"(B.S. Noveck, 2009 p.107)
Les acteurs projet pourraient ainsi déposer leur savoir dans les pages wiki, y suivre leurs projets, et partager les leçons apprises, les meilleures pratiques. Le wiki garderait dans un historique les traces de ses composants culturels. En retour il pourrait influencer ses utilisateurs à deux niveaux, tout d'abord en leurs transmettant l'ADN, la culture de l'entreprise inscrite dans ses lignes et ensuite en modifiant progressivement leur façon de travailler. C'est à dire qu'il irait au-delà de la coordination, "coordonner c'est disposer selon certains rapports en vue d'une fin" (Petit Robert 1995) et de la coopération, "coopérer c'est agir, travailler conjointement avec quelqu'un à" (Petit Robert 1995) en permettant une réelle collaboration en ligne. Et nous retenons ici la définition de M. Elliot "la collaboration c'est le processus ou deux ou plusieurs personnes créent collectivement des représentations émergentes et partagées de processus et ou de résultats qui reflètent la contribution de tous les participants." - "Collaboration is the process of two or more people collectively creating emergent, shared representations of a process and or outcome that reflects the input of the total body of contributors." (Elliot M. 2007 p.31). La distinction principale entre la coopération et la collaboration réside dans la création. "La collaboration c'est de la coopération plus de la créativité collective." traduit de (Elliot M. 2007 p.40). C. Andrus est convaincu que wiki et blogues "changeront à jamais la nature du renseignement", "Once the Intelligence Community has a robust and mature wiki and blog knowledge-sharing Web space, the nature of intelligence will change forever." (Andrus, 2005) Ce qui passera en premier lieu par un profond changement culturel, allant d'une culture de la linéarité vers une culture non-linéaire, circulaire, prenant en compte la rétroaction et la récursion.

Les idées elles mêmes sont sujettes au sein du wiki à la récursion. Ce qu'exprime avec force Dantec: "Les idées sont des entités vivantes, qui coopèrent, rivalisent, commercent et guerroient, s'influencent mutuellement, se dévorent entre elles, se disloquent, se reforment, se pillent, se violent, dans un fourmillement de relations toujours plus enchâssées, dans un état de sampling permanent, codade-décodage-surcodage-hypercodage, déconstruction-reconstruction d'anciennes formes, d'anciennes machines, à l'intérieur de synthèses nouvelles" (Dantec 1998). On pense aussi au phénomène de stigmergie définit par Pierre-Paul Grassé, "du grec stigma "signe" et ergon "action" pour signifier que les signes laissés dans l'environnement sont susceptibles de produire des actions de la part des agents" traduit de (Elliot M. 2007 p.70). Ainsi, lorsque qu'un acteur projet X va consulter le wiki, il y trouvera les signes laissés par ses prédécesseurs, signes qui influenceront sa contribution, contribution qui elle-même influencera la contribution des acteurs qui le suivront, le tout enrichi par l'épistémologie de la dialogique. Chaque contribution est en quelque sorte une émergence qui se construit sur la base des émergences qui l'ont précédé. Cette idée n'est pas nouvelle, Lessig cite notamment dans son livre Remix, les cultures traditionnelles partagées oralement entre les acteurs et leur audience où chaque nouvelle version d'un spectacle se voit enrichi des contributions et de la rétroaction avec le public (L. Lessig p.7).

La flexibilité d'édition du contenu et de la structure qu'offre le wiki à tous les usagers, techniciens ou non pourrait libérer leur créativité. Il en émergerait de nouvelles habitudes de travail chez certains pionniers qui dans leur sillage entraineraient leurs collègues. Chaque utilisateur pouvant adapter l'outil à ses besoins spécifiques. Le wiki demeure de plus en perpétuelle évolution, il est continuellement remaniable, il s'adapte à son environnement et à ses incertitudes. C'est de cette capacité perpétuelle (si le flux d'information n'est pas interrompu) à se former et à former ses utilisateurs qu'est née l'idée de culture récursive.

Structure holographique

Karl Pribram soutient que le cerveau fonctionne de façon holographique, à savoir que la mémoire est distribuée et qu'elle est ainsi reconstituable à partir de n'importe laquelle de ses parties (Morgan, 2006 p.71). La même idée est reprise par Brafman et Beckstrom à savoir qu'"un système ouvert (décentralisé) n'a pas d'intelligence centrale, celle-ci est distribuée à travers le système." (O. Brafman et R.A. Beckstrom, 2006 p.40-41) Morgan au travers de la métaphore de "l'organisation vue comme un cerveau" nous donne les clés pour tendre vers cet idéal organisationnel qui offrirait une distribution de l'information et de l'autorité source d'auto-organisation tout en demeurant flexible et résistante face aux défis constants (Morgan, 2006). Grace aux avancées technologiques nous disposons aujourd'hui avec le wiki d'un premier outil. "Il existe une nouvelle génération d'outils Internet qui permettent aux personnes de s'auto-organiser autour d'un savoir partagé. Le premier de ces outils d'auto-organisation s'appelle un "wiki"" (traduit de: Andrus, 2005).

Sur la base des 5 principes énoncés par Morgan que nous allons maintenant voir comment le wiki permet d'opérationnaliser cette vision d'une organisation holographique.

Principe n.1: construire le "tout" dans les "parties

Morgan nous propose différents moyens d'y parvenir que nous mettons ici en lumière.

L'ADN d'entreprise - Déposer le tout "organisation" dans les parties "individus"

Pour permettre "que les codes culturels qui cimentent une organisation puissent aborder l'avenir d'une façon ouverte et évolutive", en d'autres mots pour donner vie à la culture récursive, il faut donner à cette organisation les instruments pour y parvenir. Ainsi, les utilisateurs d'un wiki peuvent éditer chacune des pages, en créer de nouvelles ou encore les relier entre-elles ou à des objets externes par des hyperliens et ce en trois actions très simples: "modifier", "écrire", "enregistrer". Par l'usage d'hyperliens, les usagers connectent les parties entre elles à convenance. Ces liens pourront ensuite être représentés de façon graphique sous forme de carte heuristique dynamique. C'est la possibilité de faire des liens et de les modéliser qui donne au wiki sa capacité à diffuser l'ADN de l'organisation dans ses parties.

L'intelligence réseau - Permettre une accessibilité de points de vue multiples

Le second moyen de construire le "tout" dans les "parties" repose sur "l'intelligence en réseau" possible par la mise en place d'un système d'information performant. Le wiki est intéressant à plus d'un titre pour ce qui est de l'accessibilité et des angles de vue. Tout d'abord comme un site Web traditionnel, il est hébergé sur un serveur et offre donc un accès à distance à partir de n'importe quel ordinateur ou mobile ayant accès à Internet, supprimant les limites spacio-temporelles en terme de diffusion de l'information. Comme l'Internet, le wiki permet de mettre en relation des données, des documents, des fragments de documents, mais aussi de connecter les idées, donc les cerveaux donc les gens. "Les liens font les réseaux" (Piotet, Pisani, 2008 p.39). Pour C. Andrus, plus le nombre de liens créés dans le wiki seront importants plus ce dernier prendra de la valeur selon la loi de Metcalfe qui avance que la valeur d'un réseau augmente du carré du nombre de liens créés. "I suggest a corollary to Metcalfe’s Law. The value of a knowledge-sharing Web space (wiki and blog) grows as the square of the number of links created in the Web space" (Andrus, 2005).
Pour Noveck, des outils de "visualisation sociale" (notre carte heuristique dynamique) améliorent au sein d'une communauté le partage, la création et la compréhension d'informations complexes, ainsi que la participation aux processus collaboratifs (B.S. Noveck, 2009 p.81, 112 et 114). Elle cite également Edward Tufte pour qui, il est essentiel de quitter le monde plat en deux dimensions pour comprendre des domaines qui par nature sont multivariables (ibid p.113). Ainsi, certains wiki permettent de présenter différents angles de visions au visiteur pour l'aider à naviguer à travers l'information, à en extraire le sens et surtout à connecter des informations qui ne l'étaient pas auparavant. Ce type de modélisation aide l'utilisateur à se situer dans l'organisation et lui donne une visualisation rapide de la complexité (Deladrière 2007 p.3).
À ceci s'ajoute de nouvelles capacités de filtrage de l'information. "Les mots clés offrent des capacités de recherche différentes, organisant l'information au travers d'une classification collaborative décentralisée spontanée" (Wikipedia consulté le 28.01.09). C'est une façon démocratique de classifier. En appelant un mot clé, on obtient dans un wiki une liste de pages qui ont été marquées par ce mot offrant un nouvel angle de vision de l'information. De la même façon, les catégories offrent la possibilité de tri, sous un autre angle encore, celui-ci plus corporatif est imposé par un groupe d'experts qui en définit les critères, souvent calquées sur la structure organisationnelle. Ces fonctionnalités de visualisation et de filtrage de l'information améliorent la collaboration et font tomber les barrières hiérarchiques traditionnelles. L'utilisateur peut communiquer directement avec les autres membres. Il peut inventer lui-même au travers des mots clés et des hyperliens le chemin qui le connectera à l'information et à ses pairs. "Il n'y a pas de chemin qui mène à Rome parce qu'il n'y a pas de Rome" (O. Brafman et R. A Beckstrom, 2006 p.53).

La structure holographique - Croître et rester petit

Une petite entreprise est en générale très proche de sa clientèle et de ses employés. Lorsqu'elle atteint une certaine taille et développe son marché, en ouvrant des succursales, cette proximité peut disparaître si on lui impose une pensée centrale qui ne tient pas compte des spécificités locales. Pour les conserver tout en diffusant l'ADN de l'organisation dans les entités locales, il faut mettre en place "des systèmes d'information appropriés qui peuvent croître tout en restant petits", c'est la "reproduction holographique" (Morgan, 2006). Cette idée est partiellement véhiculée par la métaphore de l'araignée et de l'étoile de mer. L'araignée a une tête et des pattes, si l'on lui coupe la tête plus rien ne fonctionne. L'étoile de mer elle n'a pas de tête, la partie centrale de son corps n'a aucune fonction de commande, tous les organes majeurs sont répliqués dans chacun des bras. Coupez en deux une étoile de mer et rapidement, deux étoiles se reformeront (O. Brafman et R.A. Beckstrom, 2006 p.35). Si elle illustre bien par la mitose, la reproduction à l'identique de l'original, cette métaphore à deux limites par rapport au wiki. Elle ne considère pas que la partie reproduite puisse être différente de l'original et surtout que la partie y reste connectée par les hyperliens. En effet, le wiki favorise la reproduction holographique car en créant une nouvelle page, qui peut être un nouveau projet, celui-ci reste connecté à l'organisation et donc à sa culture tout en ayant sa propre autonomie pour pouvoir répondre à un besoin local précis. Ce modèle reproductif s'applique aussi à l'intérieur d'un projet. On peut imaginer que les différentes équipes d'un projet aient chacune leurs pages reliées entre elles au sein d'un wiki intégrateur, allouant à chaque équipe une zone de liberté d'expression et d'organisation tout en leurs insufflant la culture et les normes de l'organisation. Autrement dit, les "parties" ont leur espace d'expression mais restent connecter au "tout" et le visualise grâce à la carte heuristique dynamique. Chaque partie n'étant pas parfaitement identique aux autres puisque ayant une certaine autonomie, on parlera de "reproduction holographique différenciée" ( Morgan, 2006 p.104). Grâce à son autonomie et au savoir reçu de l'organisation, la partie peut s'auto-organiser.

Équipes holistiques et rôles diversifiés

Chaque membre ou équipe d'une organisation doit être capable et disposer de l'information nécessaire pour agir de façon indépendante et auto-organisée. "Le pouvoir repose en chaque individu" (O. Brafman et R. A Beckstrom, 2006 p.20). À l'image des experts du renseignement décrit par Andrus (Andrus, 2005), les membres d'une équipe projet doivent être en mesure de prendre des décisions en temps réel et d'agir indépendamment, ils doivent partager beaucoup plus d'information, ils doivent recevoir d'avantage de rétroaction des parties prenantes, ils doivent être bien mieux informés des objectifs stratégiques pour que puisse émerger une organisation projet en mesure de se réinventer continuellement et dynamiquement en réponse aux besoins des parties prenantes et des systèmes avec lesquels ils interagissent. Noveck ajoute qu'une diversité de talents et de qualifications est essentielle à une bonne collaboration et permettra aux acteurs d'accomplir ce qu'ils ne pourraient pas faire seul (B. S. Noveck, 2009 p.39 et 85). S'il est important que les membres se considèrent comme faisant partie d'un groupe (ibid p.86), il est aussi important qu'ils partagent une culture de la récursion pour éviter de tomber dans les travers de la "pensée de groupe" en anglais "groupthink".

Principe n.2: l'importance de la redondance

Si le wiki ne peut pas démultiplier les ressources humaines, il peut néanmoins par les hyperliens démultiplier l'information mise à leur disposition et ainsi permettre d'avantage de travail en parallèle et de partage. La révolution de l'information, "réduit les barrières limitant l'interaction entre des processus qui étaient auparavant isolés les uns des autres dans le temps et dans l'espace. L'information joue alors comme médiateur d'interaction" (Axelrod et Cohen, 2001 p.62) de plus, "la baisse tendancielle des coûts engendrés par la copie et la recombinaison des informations favorise souvent la diffusion rapide des stratégies" (ibid p.18).
Lorsque l'on créé une page wiki, celle-ci est stockée dans une base de données. L'accès à cette page c'est à dire la façon dont les pages wikis vont être connectées entre elles et la façon dont on va présenter l'interface va définir ce que les utilisateurs voient. On peut imaginer les pages reliées entre elles par des hyperliens flottants dans un espace en trois dimensions. En tant qu'utilisateur, je peux définir l'angle de vu qui me convient le mieux, l'adapter au besoin de l'équipe. De plus, si l'on coupe un hyperlien, la page continue d'exister et peut toujours être vu d'un autre angle par d'autres utilisateurs. Pour Ouni, les fonctionnalités wiki facilitent considérablement le processus de diffusion, d'indexation, de recherche et de capitalisation de l'information (Ali Ouni, 2008 - p.63 - Vers le KM 2.0)

Principe n.3: la variété requise

Si le "système wiki" de pilotage, doit modéliser avec un maximum de pertinence le réel du "système projet", il devra tenir compte du principe de la variété requise identifié par R. W. Ashby en 1956. C'est à dire que le "système wiki" de pilotage devra posséder une variété au moins aussi grande que le système opérant (système projet) pour pouvoir exhaustivement le contrôler. Ce que confirme Le Moigne, "Tout bon système de pilotage d’un système (opérant) doit être un modèle de ce système : tout système de pilotage qui soit à la fois le plus réussi (successful) et le plus simple doit être isomorphe du système à piloter." (Le Moigne TSG pdf 1994 - 2006 p.175) Le système wiki sera alors aussi complexe que le système projet et pourra selon la définition de A. Wilden être qualifié de système chaud.
La variété est de plus fondamentale à l'adaptation, car c'est "la variation qui fournit la matière première de l'adaptation" (Axelrod et Cohen, 2001 p.73)
Admettons qu'un projet implique dix parties prenantes distinctes, celles-ci influenceront plus ou moins le projet selon leurs pouvoirs et leurs intérêts et ce de manière positive ou négative. Pour que le système wiki puisse contrôler le système projet ces parties prenantes devront toutes êtres représentées au sein du wiki. Lorsque le projet est interne on donnera par exemple accès aux membres de l'équipe projet, mais aussi à la direction, aux ressources humaines, au département de TI etc... Si le projet est externe, on peut ouvrir le wiki ou certaines de ses sections à des partenaires, fournisseurs, organisations non gouvernementales, organisations gouvernementales, syndicats etc...
La question clé à laquelle le gestionnaire de projet devra répondre est: "Quel est le bon équilibre entre variété et uniformité?" (Axelrod et Cohen, 2001 p.76)

Principe n.4: les spécifications minimales

Les outils très structurés comme les ERP (Enterprise resource planning), MS Project et autres sont efficaces quand les processus sont connus, mais montrent leurs limites lorsque le niveau d'incertitude augmente. Les wikis non pas de structure fixe d'organisation du contenu. Cela leur donne un avantage pour s'adapter au changement et muter face à l'incertain. Dans un autre ordre d'idée, d'aucuns voudront parfois surprotéger les accès au wiki pour éviter vandalisme et erreurs. Nous leurs proposons ici de réfléchir à l'analogie faite par Jimmy Wales fondateur de Wikipedia qui dit, ce n'est pas parce qu'un restaurant à steak donne des couteaux à ses clients que ceux-ci vont s'entre tuer avec et qu'en conséquence chaque table devra être sécurisée par une cage de fer. (Wales, 2005). De la même façon, trop de protection sur un wiki, irait à l'encontre de l'épistémologie dialogique terreau de la pensée complexe. Pour fonctionner, le wiki a donc besoin de règles le plus minimales possible, dont "la neutralité de point du vue" chère aux wikipédiens qui est selon nous incontournable pour composer avec la complexité. Ces règles seront définies par chaque organisation en fonction de sa culture, de ses normes tout en restant minimales pour ne pas tomber dans la sur-structuration et conserver au wiki sa flexibilité originelle.

Principe n.5: apprendre à apprendre

Lorsque Morgan décrit les aptitudes qu'une organisation doit acquérir pour devenir apprenante, il ajoute que ce n'est pas chose aisée et que cela dépend avant tout du "travail en cours" c'est à dire de la capacité à "stimuler l'apprentissage continuel" (Morgan, 2006 p.85-86). Or le wiki de la bouche de son inventeur W. Cunningham est par essence conçu pour être en perpétuelle évolution. "A wiki is not a carefully crafted site for casual visitors. Instead, it seeks to involve the visitor in an ongoing process of creation and collaboration that constantly changes the Web site landscape" (B. Leuf et W. Cunningham). La CIA exploite ainsi un wiki appelé Intellipidia pour se transformer en une communauté qui se réinvente dynamiquement par un apprentissage constant et qui s'adapte aux changements environnementaux liés à la sécurité nationale - The objective that was identified at the outset of this article was that the Intelligence Community must be able to dynamically reinvent itself by continuously learning and adapting as the national security environment changes. (Andrus, 2005). Andrus souligne aussi que les restructurations sont inefficaces pour relever les défis de notre siècle car elles laissent supposer qu'en utilisant le passé proche on peut prévoir l'avenir.

Reprenons maintenant une à une les aptitudes que Morgan présente pour parvenir à l'organisation apprenante.

analyser et anticiper le changement dans le milieu au sens large, afin de détecter des variations révélatrices
Si le wiki par la combinaison d'une épistémologie dialogique, d'une culture récursive et d'une structure holographique, réunit et modélise les commentaires, les informations, les recommandations de l'ensemble des parties prenantes, force est de croire qu'il sera possible de détecter "des variations révélatrices" susceptibles d'influencer le projet et à un plus haut niveau l'organisation dans son ensemble.

acquérir la capacité de mettre en doute, de provoquer et de modifier des normes de fonctionnement et des postulats
Cette combinaison épistémologique, structurelle et culturelle si elle a fait émerger des tendances, "des variations révélatrices", devrait motiver l'organisation à ajuster ses normes de fonctionnement. Cela sera d'autant plus facile, si la culture du wiki par l'effet de récursion modifie la façon dont les équipes collaborent. La transparence apportée par le wiki créant la confiance qui favorisera le changement.

permettre que naisse la direction stratégique et le modèle d'organisation qui s'imposent
Toujours basé sur la même combinaison, la direction stratégique pourra émerger des renseignements que fournira le wiki, mais pour pouvoir dépasser le niveau projet et atteindre un niveau organisationnel, ils devront être combiné à d'autres renseignements stratégiques liés à la politique, à la géopolitique, à l'environnement etc... qui eux aussi pourront être enregistrés dans le wiki.

élaborer des concepts qui leur permettraient de devenir experts dans l'art de l'apprentissage en boucle double
C'est ici que dialogique et récursion prennent tout leur sens. En visualisant les logiques antagonistes, concurrentes et complémentaires et en favorisant la culture récursive, les acteurs projet disposeront de moyens pour les aider à penser en boucle double et l'organisation pourra s'auto-organiser. Les wikis ont déjà fait la preuve de leur capacité auto-organisationnelle notamment avec Wikipedia dont le "système s'autorégule progressivement et est plutôt convergent que divergent vers un mode anarchique" (Dudezert et Boughzala, 2008 - Ali Ouni p.59).

Le wiki dispose des attributs nécessaires pour construire le tout dans les parties, pour s'assurer de la redondance de l'information, pour ajuster sa variété au système qu'il doit opérer, pour limiter les spécifications d'usage et enfin pour favoriser l'apprentissage en boucle double. Autrement dit pour mettre en place une structure holographique.

Le wiki est par nature dialogique, il favorise une culture récursive et le permet le déploiement d'une structure holographique. Toutefois les trois principes de complexité auxquels nous faisons référence, sont dépendants les uns des autres et ne sauraient permettre au wiki de composer avec la complexité s'ils n'étaient pas appliqués simultanément. Comme le souligne Morin: "l'idée hologrammatique est elle-même liée à l'idée récursive, qui elle-même est liée à l'idée dialogique en partie" (Morin, 2005 p,101).

2.3.2 Cadre conceptuel


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Figure 2.10: Cadre conceptuel: La gestion de projet croise le wiki

Le cadre conceptuel modélise le wiki. Deux grands constats (en orange) y sont tirés de la revue de littérature (en jaune), puis des tremplins de la systémique et de la complexité sont extraits les quatre questions de systémographie, trois principes de la complexité de Morin, et les cinq principes de l'hologramme de Morgan pour les combiner aux attributs du wiki. De leur combinaison naissent les notions d'épistémologie dialogique, de culture récursive et de structure holographique (en bleu). Enfin, proposition est faite, d'utiliser le wiki comme un outil pour composer avec la complexité en gestion de projet.

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